Cuba ou l'île des pianistes. Dionision Jesus "Chucho" Valdés Rodrigues est né dans cette boîte à musiques, motivé aussi par le magistère de son père Bebo Valdés, une légende de l'île. De l’orchestre paternel (à la fin des années 50) à l’ensemble Irakere qu’il fonde en 1973 avec Arturo Sandoval et Paquito D'Riveira, le pas fut assez vite franchi. Chucho Valdés est resté fidèle à une musique de groupe calorifère mêlant airs et rythmes cubains à la tradition du jazz, en passant aussi par la case "fusion". Comparable dans la manière au traitement hard bop des années 50 (on peut penser aux " Jazz Messengers " d’Art Blakey), laissant les solistes dérouler leurs idées mélodiques sur une paire rythmique avec laquelle il travaille depuis de nombreuses années, Chucho Valdés renoue avec l'histoire. En recréant ce groupe qui le fit connaître dans le monde entier, il joue sa carte majeure. Il y a plus : en invitant son compatriote Arturo Sandoval, qui justifie son titre de fils spirituel de Dizzy Gillespie, il place son concert sous le signe de la très haute virtuosité, de l'expression lyrique exacerbée. La nostalgie serait-elle encore ce qu'elle a été ?
- Arturo Sandoval (trompette) Osvaldo Fleites (trompette) Eddy De Armas Jr. (trompette) Carlos Averhoff Jr. (saxophone ténor) Luis Beltran (saxophone alto) Chucho Valdés (piano) José A. Gola (basse) Horacio Hernandez (batterie) Roberto Jr. Vizcaino Torre (percussions) Ramon Alvarez (voix)
- chucho-valdes.com | arturosandoval.com
Comme la plupart des pianistes cubains, Rolando Luna est arrivé sur le marché prêt à l'emploi : culture classique complète, multiples strates de la musique de son île bien vivantes au bout de ses doigts, prédisposition au jazz (talent d'improvisateur, swing, attaque instrumentale parfois percussive, "monkienne" à l'occasion, chronomètre intérieur sans faille...). À quoi il faut ajouter un plaisir visible à l'ouvrage, une virtuosité piquée d'humour, un "savoir danser" sur le clavier qui le hissent aisément au sommet de la diaspora caribéenne des hispanoparlantes. Lors de ce concert, Rolando Luna décroche l'astre que désigne son patronyme... et c'est une pluie d'étoiles qui tombe sur son public ! Cuba, ou l'île aux trésors de moins en moins cachés…
Deux claviers ne sont pas de trop pour arriver à bout des richesses harmoniques de ce "cubanisme" assaisonné de jazz moderne auquel les musiciens de ce collectif apportent une sophistication que leur propension au jeu rend facile à écouter. Le parcours des musiciens formant El Comité vaut certificat d'authenticité, mais incarne aussi ce brevet de compétence multi-usages qui caractérise tous les diplômés des conservatoires et écoles de musiques de Cuba. Leur concert Marciacais célèbre la joie presque primitive de faire de la musique ensemble. Cette camaraderie prend aussi des allures inattendues, revisitant quelques tubes de groupes comme Oasis ou des reprises (Fama, par Rosalia et The Weeknd), tordant le bras à quelque cha-cha-cha en y introduisant des angularités "à la Monk", improvisant sur un rythme funky, chavirant telle rumba dans un alanguissement romantique ou s'amusant sérieusement dans une séquence mélodique classique. Ne négligeant pas quelques sonorités plus contemporaines des musiques dites "urbaines", @el.comite.cuban.groove s'inscrit donc dans un continuum vertement dépoussiéré par l'intrépidité, l'humour et cette gourmandise de l'instant qui n'est accessible qu'aux musiciens dont la technique permet d'effacer tout obstacle à l'inspiration.
- Carlos Sarduy (trompette) Irving Acao (saxophone) Harold López-nussa (claviers, piano) Rolando Luna (claviers, piano) Gaston Joya (basse, contrebasse) Rodney Barreto (batterie) Yaroldy Abreu (percussions)
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