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2004
D’un point de vue étymologique, le mot original « Godspell » vient du vieux saxon. Le vocable Spell signifie Parole ou Nouvelle. Quant à God, il ne s’agit pas de Dieu mais d’une forme archaïque de l’adjectif good. Ainsi, son équivalent français est « la bonne nouvelle ». Pour ce concert de Noël et dans la plus pure tradition du « Godspell », Jazz in Marciac annonce une vraie bonne nouvelle : l’intégralité de la recette de ce spectacle sera versée au « Comité Départemental de la ligue contre le cancer ».
The Inspirational Charms poursuit la tradition des ensembles féminins illustrés par les Caravans, les Davis Sisters et les Clara Ward Singers. Le pianiste Cliff Dubose fournit un soutien remarquable aux chanteuses. La formation restitue le patrimoine du gospel sans en perdre la ferveur et la « fièvre ». Le groupe met ses atouts au service d’un répertoire essentiellement religieux. Intervenant à tour de rôle en solo, chaque chanteuse interprète une version inspirée de classiques : God Is Using Me ; Amazing Grace ; Yes Jesus Loves Me … Dans le domaine religieux, leurs chants sont émouvants et dynamiques, tel est le cas sur Jesus What A Wonderful Child. Parfois, les pièces sont pimentées de Blues dont le « feeling » est rehaussé par les riches nuances des voix (This Maybe My Last Time ; Swing Low…). La doyenne Marguerite Gatling possède des qualités uniques d’interprète, son chant déborde de passion et d’émotion sur I’m Holding On. Quant à Sue Atkins, elle démontre tout son savoir-faire sur un titre de sa composition : Lord I Thank You. Rosetta Stokes, Shelia Snipes et Marquita Gatling sont dans une forme vocale éblouissante comme le montre l’impeccable mise en place de la complémentarité de leurs voix.
Problème technique : The Inspirational Charms sont contraintes à chanter dans l’obscurité la plus totale. Peu importe ! La beauté du spectacle s’en retrouve décuplée. Leurs voix puissantes confèrent une majesté impressionnante à ces quelques notes jouées dans le noir. La lumière revient sous un torrent d’applaudissements et les charmantes gospel singers entament un Move On Up A Little Higher qui emporte l’adhésion du public. Le traditionnel bain de foule qui suit suscite la participation des spectateurs. Comme à l’accoutumée, la sauce prend, le public se lève et tape dans les mains, les chanteuses viennent chercher quelques jeunes filles intimidées pour danser. Le groupe marque sa volonté de créer une ambiance telle qu’on pourrait l’imaginer lors d’une messe gospel dans une paroisse de Chicago. Malheureusement le gospel est un art authentiquement afro-américain et notre public ne se manifeste que par des applaudissements prolongés. Cette différence culturelle ne nuit pas au plaisir bien au contraire, la joie contenue des spectateurs atteint la sensibilité des chanteuses qui souhaitent plus que tout nous transmettre leur bonheur musical. C’est un spectacle débordant de générosité et d’émotion.
Une soirée de Gospel à quelques jours de Noël traduit un désir profond de convivialité, de lien social, de partage. La popularité grandissante de ce type de formation apporte la preuve que Gospel et succès commercial ne sont pas incompatibles. La fréquentation du concert de ce soir va une fois de plus dans ce sens. C’est une bonne nouvelle pour une bonne cause puisqu’il s’agit d’un concert organisé au profit de la lutte contre le cancer. Jazz in Marciac remercie donc particulièrement les spectateurs pour s’être déplacés en masse et souhaite à son public d’agréables fêtes de fin d’année.
Frédéric Gendre
Photo © Pierre Vignaux