Ahmad Jamal, comme Art Tatum, Oscar Peterson, Erroll Garner ou Martial Solal avait inventé un style et s'était forgé très tôt une signature reconnaissable instantanément. Au cours des dernières années, son piano avait pris un tour plus nettement rythmique, autour de ces séquences de riffs dont il a toujours parsemé ses oeuvres, parfois prétextes à des compositions entières. Mais il sculptait encore ces à-pics vertigineux, passant du fortissimo au pianissimo, instituant des silences où basse et batterie prennent leur relief avant qu'une note de piano dans le grave ne ponctue la séquence de façon martiale. De ce muscle, de cette sensualité très contrôlée, de cette jeunesse qu'il n'avait jamais perdue, il en est question lors de cet hommage que lui rend Marciac. La liste des invités impressionne : George Coleman, un dinosaure du sax ténor, inextinguible improvisateur qui sut bousculer adroitement Miles Davis, la chanteuse Mina Agossi, dont le charme et les mélismes ondulants avaient séduit Ahmad, parmi d'autres noms trop heureux "d'en être". Le pianiste Marcus Roberts qui utilise des dispositifs orchestraux initialement empruntés au trio d'Ahmad Jamal. Le batteur-percussioniste Herlin Riley, originaire de la Nouvelle Orléans, magicien de la polyrythmie, dont la danse de forgeron ailé attisant son drum set est en soi un spectacle savoureux.

• George Coleman (saxophone) Marcus Roberts (piano) Shahin Novrasli (piano) Cliff Barnes (orgue) Jason Marsalis (vibraphone) John Shannon (guitare) Calvin Keys (guitare) Martin Jaffe (contrebasse) Herlin Riley (batterie) James Johnson (batterie) Vieux Kanté (percussion, calebasse) Mina Agossi (chant) Catherine Vallon-Barry (texte) Special featuring Jowee Omicil (saxophone, flûte)