Le Bis
Tout un festival
À Marciac, pas de festival Off qui tienne. Parlez du festival Bis, histoire de bien souligner que cet événement fait partie intégrante de JIM.
Et comment pourrait-on en douter, ne serait-ce que par sa situation ? Sous de vastes bâches blanches, un podium dressé place de l’Hôtel-deVille, en plein centre du village.
Tout autour, des bars, des restaurants, des galeries d’art, des stands où l’on vend des CD, des livres, des chapeaux de paille, des produits artisanaux…
On ne l’ignorait pas mais il est toujours utile de le rappeler : le jazz pousse sur la vie.
Et il fournit toutes sortes de fleurs. Au long de ces quasi trois semaines, les artistes qui défilent sur la scène représentent toutes les tendances, du jazz traditionnel au plus contemporain, à quoi se joignent, sans se faire prier, les musiques cousines, blues ou rythmes latinos.
Comment sont-ils choisis ? Sur leurs qualités, bien évidemment, avec une mise en avant des talents locaux.
Mais aussi des talents en herbe: chaque année, on honore la relève grâce aux stagiaires de L’Astrada et à une journée dédiée aux Ateliers d’Initiation à la Musique de Jazz.
De la 6e à la 3e , les groupes d’élèves du collège de Marciac se succèdent.
On en retrouvera certains au restaurant La Péniche, sur le lac, qui constitue tous les jours à partir de 17H une antenne du festival Bis.
Du Bis au chapiteau
Il y a les spectateurs assidus. Capables de réciter le programme par cœur, ils scrutent leur montre pour ne pas rater le Pierre Christophe Quartet, par exemple, ou le Mississippi Jazz Band.
Il y a les spectateurs de hasard, qui s’assoient face à la scène sans savoir ce qu’ils vont entendre et se retrouvent sur la même chaise trois heures plus tard.
Et il y a les promeneurs qui ne songeaient même pas à s’arrêter mais qui tombent sous le charme d’un riff de guitare ou du swing d’une voix. C’est précisément ce qui est arrivé l’an dernier à Régine Billot, ancienne directrice du service de presse programmes des chaînes du groupe Canal+. Cette néo-Marciacaise avait plutôt l’habitude de hanter le grand chapiteau avant d’être prise dans les filets d’une trompette :
J’étais avec des amis. Nous avons tourné nos yeux vers la scène, et nous avons été ébahis par le son mais aussi la jeunesse de Lucienne Renaudin-Vary. Nous nous sommes aussitôt assis pour l’écouter.
La même Lucienne Renaudin-Vary avait assuré la première partie de la soirée d’ouverture du festival de jazz international, avant le concert de Wynton Marsalis et d’Ibrahim Maalouf.
Du chapiteau à la scène du Bis : le trajet est peu commun. En revanche, on ne compte plus les artistes de renom qui ont accompli le parcours inverse, comme Tigran Hamasyan, Émile Parisien ou Leïla Martial. Ou encore la prodigieuse chanteuse Youn Sun Nah, qui garde un souvenir plus qu’ému de ses premiers pas à Marciac : « Nous étions en 2000. C’était magique ! Je venais de sortir un album en Corée enregistré avec des musiciens français. J’avais apporté une centaine d’albums : j’ai tout vendu. Je me souviens des oiseaux que je voyais dans le ciel pendant que je chantais, et même d’une cloche d’église qui s’est mise à sonner ! Des années plus tard, des gens m’ont reparlé de ce moment. C’est là qu’a commencé mon histoire d’amour avec Marciac. C’était le premier festival de jazz auquel je participais, et c’était l’un des plus prestigieux du monde ».
À la bonne franquette
Depuis Youn Sun Nah a tout connu, de L’Astrada au grand chapiteau en passant par les master classes : « Je suis même venue en hiver au collège, et c’était comme si je faisais partie de l’équipe des enseignants.
J’ai un rapport particulier avec Marciac. Quand j’y suis, j’ai moins l’impression d’être une artiste qu’une habitante du village ».
Le saxophoniste et compositeur Olivier Temime évoque lui aussi avec affection le festival Jazz in Marciac, et en particulier le festival Bis : « Je m’y suis produit la première fois en 1998 avec TonTon Salut.
Cette même année, j’ai joué avec Laurent de Wilde sous le chapiteau et je donnais des stages de saxo : une période très intense ! »
Depuis, il ne s’est pas écoulé une édition ou presque sans qu’on puisse l’applaudir sur la scène de la place. « On est en plein air, tout se passe sans chichis, à la bonne franquette. Au festival Bis, je suis tout à la fois acteur et spectateur : je sors de scène, je traîne autour, je mange une tartine de foie gras en écoutant la musique, je vais faire le bœuf dans un bar…
C’est une espèce de bain permanent. Et j’apprécie beaucoup la proximité avec le public. Les rapports sont directs. Les gens viennent vous faire signer des autographes, des dédicaces sur des photos ou des disques. Ce n’est pas le public des clubs parisiens : il y a toutes sortes de personnes, de toutes les nationalités, et de toutes les catégories sociales car les concerts sont gratuits. »
Le festival Bis ? Manifestement, on en redemande…
Olivier Prémon