2024
18 Juillet > 04 Août

Le Journal

de Jazz in Marciac

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Interview

Jean-Louis Guilhaumon

Pour relancer un festival en 2021, Jazz in Marciac doit "repartir d'une feuille blanche"

C’est une tribune en forme de cri du cœur et de signe de remobilisation. Avec 118 autres organisateurs, le président de Jazz in Marciac a signé une tribune, ce week-end qui pose les jalons d’une renaissance des festivals, l’été prochain. Dans La Dépêche du Midi, Jean-Louis Guilhaumon explique pourquoi « il y croit », même s’il sait le défi immense.
 

Jean-Louis Guilhaumon, vous avez participé début octobre aux Etats généraux des festivals français, organisés en Avignon sous l’égide du ministère de la Culture. Qu’en avez-vous retenu ?

Ce rendez-vous a été très utile car il a permis de faire le point sur la situation réelle, sur les difficultés rencontrées par chacun d’entre nous. Il y a une clause de revoyure, donc on pourra faire des points d’étape. Il est très important de pouvoir se réunir et échanger avec d’autres acteurs de façon à trouver de solutions. Ce qui nous est demandé, c’est de nous réinventer. C’est une belle formule mais quand il faut passer aux travaux pratiques, c’est tout de suite plus compliqué.

De votre côté, sur quelles bases pensez-vous pouvoir relancer le festival en 2021 ?

C’est ce qui nous occupe en ce moment. J’ai présenté des propositions pour l’avenir lors du dernier conseil d’administration de Jazz in Marciac. Nous sommes aujourd’hui dans l’obligation de résoudre une équation à un grand nombre d’inconnues mais personne n’est sûr de rien. Comment les artistes voyageront en 2021 ? Est-ce que les publics reviendront? Est-ce que nos modèles économiques pourront fonctionner? Est-ce que les collectivités pourront nous accompagner et jusqu’à quel point ? Vous voyez qu’il y a beaucoup d’interrogations.

Pour 2021, nous allons imaginer un certain nombre d'options qui portent sur la durée du festival, les lieux d'expression, les jauges et nos modalités d'organisation. Les contraintes nous amènent à rester très imaginatifs

Pourtant, des festivals, en région, comme Pause Guitare à Albi, annoncent déjà qu’ils vont allonger leur durée et réduire les jauges des concerts pour prendre en compte la situation sanitaire...

Je suis surpris de ces déclarations ou des certitudes affirmées ici et là. Cela me semble prématuré. Ce qui est sûr, c’est qu’il nous faut construire un modèle compatible avec les contraintes dont nous ferons l’objet, mais qui peut dire aujourd’hui, alors que l’épidémie continue, à quel niveau se situeront ces contraintes? Je réserverai la priorité de notre réflexion, vous le comprendrez, aux administrateurs de Jazz in Marciac et j’espère pouvoir en dire plus le 19 décembre, si nous pouvons tenir à cette date l’assemblée générale. Pour le festival 2021, nous allons imaginer un certain nombre d’options qui portent sur la durée du festival, les lieux d’expression, les jauges, nos modalités d’organisation. Les contraintes nous amènent à rester très imaginatifs...

On a du mal à imaginer Jazz in Marciac sans son chapiteau...

C’est vrai que la structure du chapiteau, lieu emblématique du festival, semble s’imposer mais encore une fois, il ne faut pas raisonner sur les bases de ce que nous avons construit depuis 1978 à Marciac, et patiemment consolidé durant les 40 années qui ont suivi. Il faut comprendre que nous repartons d’une page blanche. Mais le festival peut compter sur la mobilisation très forte des bénévoles et de l’équipe salariée. Ce qu’on souhaite, c’est créer un événement qui sera probablement différent de ce qu’était JIM mais qui soit fidèle à l’esprit et au socle de valeurs sur lesquels le festival a pu grandir et rayonner.

Dans ces conditions, comment bâtir la programmation ?

C’est ce qui nous occupe le plus aujourd’hui. Il faut se donner une feuille de route. Tout est à revoir, et il ne faut pas limiter sa réflexion à 2021. Je pense que nous ne reviendrons pas à un fonctionnement tel que nous l’avons connu jusqu’en 2019 avant que nous ayons réussi à vaincre cette épidémie, cela peut prendre deux ou trois ans.

En lisant la tribune commune publiée par 119 festivals, on est se dit que l’optimisme est plutôt de mise, non ?

Oui, moi-même je suis optimiste de nature, et résilient. Nous allons faire feu de tout bois pour exister. Pour cela, il faut garder nos valeurs, nos compétences et mobiliser l’ensemble de la ressource. Cette année a quand même permis de mieux mesurer l’importance de l’événementiel et tout ce que la culture apporte à notre territoire. Ce qui était considéré comme un acquis doit faire l’objet aujourd’hui d’une réappropriation.

 

Propos recueillis par Pierre-Jean Pyrda pour La Dépêche du Midi

Jean-Louis Guilhaumon © Matthieu Sartre

Jean-Louis Guilhaumon © Matthieu Sartre